Un Western en Savoie

La vallée d’Abondance, située au cœur des Alpes françaises, est aujourd’hui surtout connue pour ses paysages à couper le souffle et son riche patrimoine historique. Mais derrière cette beauté sereine se cache une histoire tumultueuse de luttes entre douaniers et contrebandiers. Plongez avec nous dans le monde des contrebandiers qui tentaient d’échapper à la loi en empruntant des chemins clandestins !

Le jardin de la contrebande

La vallée d’Abondance, avec ses étroits cols de montagne et ses forêts denses, offrait un environnement parfait pour les activités de contrebande. La proximité de la frontière suisse en faisait une zone stratégique pour le passage de marchandises telles que le tabac, le sel, l’alcool et le café, lourdement taxées en France. Les barrières naturelles représentaient un défi pour les douaniers, tandis que les contrebandiers tiraient parti de leur connaissance locale et des terrains difficilement accessibles.

L’origine de la contrebande

La contrebande dans la vallée d’Abondance remonte au Moyen Âge, mais le phénomène atteint son apogée aux XVIIIe et XIXe siècles. La Révolution française et les guerres napoléoniennes provoquèrent des bouleversements économiques et conduisirent à de lourdes taxes et des restrictions commerciales. La population locale, souvent pauvre et dépendante de l’agriculture, voyait dans la contrebande une opportunité d’augmenter ses revenus. Ainsi, un marché noir florissant vit le jour, où les contrebandiers prospéraient.

Les Gabelous contre-attaquent

Pour lutter contre la contrebande, des unités spéciales de douaniers furent mises en place. Ces douaniers, connus sous le nom de « les gabelous », patrouillaient les zones frontalières et surveillaient les activités suspectes. Ils travaillaient souvent dans des conditions difficiles et risquaient leur vie lors de confrontations avec des contrebandiers armés. Pour tenter de couper les routes de contrebande, des tours de guet et des postes de contrôle furent également construits.

Méthodes ingénieuses des contrebandiers

La contrebande était un véritable savoir-faire. Se faire prendre en flagrant délit avait de lourdes conséquences : en plus de la confiscation des marchandises, les contrebandiers risquaient des amendes allant jusqu’au double de la valeur des biens, voire la prison ou même la peine de mort.

Les contrebandiers utilisaient donc diverses méthodes astucieuses pour éviter les douaniers. Ils opéraient principalement la nuit, s’appuyant sur le terrain accidenté et des chemins secrets. L’utilisation de doubles fonds dans les charrettes et la dissimulation de marchandises dans des tonneaux à double paroi faisaient partie des nombreuses tactiques ingénieuses.

Même les chiens étaient entraînés à devenir des contrebandiers aguerris. Un chien pouvait partir seul, armé d’une fourche et d’une fourche à foin, avec des marchandises de contrebande attachées. Les douaniers chassaient donc aussi les contrebandiers à quatre pattes, et comme preuve sanglante d’interception, ils coupaient une patte qu’ils suspendaient à la porte de leur cabane. Le commandant distribuait ensuite des primes en fonction du nombre de pattes de chiens.

Histoires de café

La lutte entre les contrebandiers et les douaniers a donné naissance à de nombreux récits passionnants et légendes dans la vallée d’Abondance. L’un des récits les plus célèbres est celui de « Le Chamois Noir » (Le Chamois Noir), un contrebandier notoire qui échappa aux douaniers pendant des années grâce à sa connaissance exceptionnelle du terrain et son ingéniosité stratégique. Ses aventures furent ensuite romancées dans le folklore local et la littérature.

Amis et ennemis

La contrebande ne se faisait pas seul, tout un réseau de complices y participait. Pensez aux fermiers qui guidaient le chemin, aux villageois qui offraient un abri, et même au curé qui cachait les marchandises dans son église. On dit même que le domaine skiable transfrontalier des Portes du Soleil doit sa naissance à la grande solidarité qui s’est développée grâce à la collaboration dans la contrebande.

La fin de la contrebande

Avec l’amélioration des infrastructures et les changements dans la législation, la contrebande a progressivement diminué au XXe siècle. L’émergence de moyens de transport et de communication plus efficaces rendait plus difficile l’opération des contrebandiers en toute discrétion. De plus, de nombreux produits autrefois lourdement taxés devinrent plus librement commercialisables grâce aux changements économiques et aux accords commerciaux. Aujourd’hui, la vallée est une paisible destination touristique, mais les histoires d’autrefois perdurent dans la culture locale et les souvenirs. On retrouve encore la remontée mécanique « Gabelou », la fête de la contrebande, et les récits héroïques continuent de s’échanger au comptoir d’un café.

Sources

Archives de la vallée d’Abondance.
Musées historiques locaux et centres de documentation.
Littérature sur l’histoire de la contrebande dans les Alpes françaises.